Joli mois de décembre où le vert se cardinalise de rouges flamboyants et letchisants (ouais, l’été austral rend lyrique, les abeilles butinent les fleurs et tout ça, et ces kounyiss ton momon de guêpes se planquent sous les feuilles et me piquent en attendant que leurs nids grossissent et que je me goberge de leurs larves avec un sentiment de vengeance accomplie) ; bientôt Noël et des platées cachalottesques, y a juste les mangues qui se font un peu désirer, heureux celui qui a le menton gommé de jus et de pulpe. Avant Noël, rendez-vous au Trock’n roll, dimanche 18 décembre à la Ravine des sables, vous pourrez enfin voir le site et les pauvres hères qui fréquentent ce lieu à la lumière du jour (n’oubliez pas les lunettes de soleil « I like to hide behind my glasses »), et avant le feu d’artifice en famille, une soirée d’antéréveillon rock le vendredi 23 décembre à l’Ilot (St Louis) avec Circle A et Le Pain des fous, y en a qui vont moins faire les malins le lendemain à la vue des plateaux d’huîtres ou de foie gras.
Et pour passer les vacances lisez donc Limonov d’Emmanuel Carrère (éd. POL). Carrère raconte la vie d’Edouard Limonov mais en fait il raconte aussi un peu sa vie ou les vies dont il aurait rêvé peut-être. Il a connu Limonov quand c’était un écrivain underground russe exilé que tout Paris s’arrachait avant que son coté obscur révélé après la chute de l’URSS et en ex-Yougoslavie n’en fasse un type pas fréquentable pour des gens éclairés. Limonov a une vie passionnante et pleine de rebondissements, de doutes, d’échecs, de revanches, d’aventures et Carrère la raconte bien et réussit à le faire sans jugement, même si on sent bien une coupable admiration pour un type qui a eu la vie aventureuse que tout jeune lecteur de London ou Verne a rêvé de vivre. La description par Carrère des « esprits subtils », donneurs de leçons, pseudo humanistes cyniques postés dans les coulisses du pouvoir est excellente.
La description du parti National- bolchevique (!) de Limonov (les nasbols) donnerait presque l’envie d’en créer une section locale quand on lit Carrère citant Limonov : « Tu es jeune. Ca ne te plaît pas de vivre dans ce pays de merde. Tu n’as envie de devenir ni un popov ordinaire, ni un enculé qui ne pense qu’au fric, ni un tchékiste. Tu as l’esprit de révolte. Tes héros sont Jim Morrison, Lénine, Mishima, Baader. Eh bien voila : tu es un nasbol. » J’entends au loin un mien ami bédéaste avec un penchant social-démocrate hurler au fascisme mais je continue à lire Carrère qui a pourtant certainement les mêmes penchants : « [la revue] Limonka et les nasbols ça a été la contre-culture de la Russie. La seule : tout le reste est bidon, embrigadement et compagnie. Alors évidemment qu’il y avait là-dedans quelques brutes, des skins avec des chiens-loups […] Mais il y avait aussi tout ce que les petites villes de la Russie profonde comptent de dessinateurs de BD autodidactes, de bassistes de rock qui cherchent des complices pour former un groupe, de types qui bidouillent de la vidéo, de timides qui écrivent des poèmes en cachette, se languissent pour des filles trop belles et rêvent sombrement de dézinguer tout le monde à l’école et de se faire exploser après, comme ça se fait en Amérique. Les satanistes d’Irkoutsk, les Hell’s Angels de Viatka, les sandinistes de Magadan. » Le « bunker », (QG des nasbols à Moscou) était « comme un mélange d’atelier squatté par un collectif d’artistes, d’internat pour jeunes délinquants, de dojo d’arts martiaux et de dortoir improvisé pour accueillir le public d’un festival de rock. Les affiches et peintures qui recouvraient les murs rongés d’humidité représentaient Staline, Fantômas, Bruce Lee, Nico et le velvet Underground. » On se prend à rêver d’un Fight Club pour de vrai, version cyrillique (j’entends encore le mien ami s’esclaffer).
Dans des contrées bien plus proches, de mauvaises nouvelles pour le Do it yourself me parviennent, le Unit 11, bar concert alternatif de Durban dans lequel j’ai eu la chance de boire quelques bières entourés de gens fort sympathiques doit fermer à la fin de l’année. Où donc les éléphants iront-ils boire un coup quand ils vont à la plage ?
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